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Malgré l'annonce d'une intervention des gendarmes, environ 300 agriculteurs restaient mobilisés jeudi soir pour empêcher l'abattage de 200 bovins dans une ferme d'Ariège, après la découverte mardi d'un cas de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) dans cet élevage au pied des Pyrénées.
En début de soirée, les forces de l'ordre s'approchaient de la ferme. Des jets de pierre de la part des protestataires et de grenades lacrymogènes par les forces de l'ordre ont duré quelques minutes.
Les manifestants, notamment de la Coordination rurale mais aussi de la Confédération paysanne et des sympathisants du mouvement, occupent depuis mercredi matin les abords d'une ferme située dans le village des Bordes-sur-Arize.
Le préfet de l'Ariège a assuré que les deux frères propriétaires du troupeau lui avaient donné leur accord pour l'abattage des 207 blondes d'Aquitaine, conformément au protocole sanitaire de lutte contre cette maladie, et dénoncé la poursuite de l'action des protestataires.
"Il reste ce soir un noyau de personnes qui veulent en découdre, je lance un appel à la raison. On ne doit pas être dans l'affrontement", a déclaré lors d'une conférence de presse le préfet Hervé Brabant.
Il a demandé en début de soirée "à tous les manifestants de respecter cette volonté des éleveurs et de quitter les lieux dans le calme".
- Vaccinations -
L'abattage, seule méthode efficace pour éviter que "la maladie se diffuse dans l'ensemble du cheptel français", se fera "dès que possible" puis une campagne de vaccination sera lancée dans le département, a annoncé le représentant de l'Etat.
Sur les 33.000 bovins d'Ariège, 3.000 ont déjà été vaccinés le mois dernier, dans les zones proches des Pyrénées-Orientales, où des foyers ont été détectés.
"Notre intention est d'empêcher (l'abattage)", dit Jérôme Bayle, figure régionale du mouvement de protestation agricole.
"C'est vraiment une place de résistance et j'espère qu'elle va tenir le plus longtemps possible", a pour sa part assuré Bertrand Venteau, président de la Coordination rurale (CR).
- Protocole expérimental -
Les syndicats agricoles locaux et la chambre d'agriculture de l'Ariège ont proposé en vain un protocole expérimental au ministère de l'Agriculture, demandant notamment que seules les vaches contaminées soient abattues et qu'une campagne de vaccination massive soit lancée.
Jusqu'ici, la règlementation visant à stopper la propagation de la maladie prévoit que l'ensemble du troupeau concerné soit abattu et l'instauration de "zones règlementées" dans un rayon de 50 km autour du foyer de DNC, un périmètre dans lequel les déplacements de bovins sont interdits ou restreints et où les bêtes sont vaccinées.
Dans les Hautes-Pyrénées, un autre troupeau d'une vingtaine de bovins doit être abattu vendredi, a annoncé le préfet du département Jean Salomon. Dans cette exploitation située dans le village de Luby-Betmont, quelques dizaine d'éleveurs sont également mobilisés pour empêcher l'intervention des services vétérinaires.
"Les tentatives de blocage ou les regroupements observés en proximité des exploitations font courir à tous les éleveurs un risque de propagation supplémentaire de la maladie", s'est inquiété le préfet des Hautes-Pyrénées.
- "Changer de politique" -
"La mobilisation paye, ça a retardé l'échéance", considère Bertrand Venteau, appelant également à une vaccination massive et à "une grande unité du monde agricole".
La ministre de l'Agriculture "Annie Genevard doit changer sa politique, sinon elle va nous foutre le feu dans les campagnes", a-t-il poursuivi, estimant que la maladie "n'est pas sous contrôle".
Apparue en juin en France et non transmissible à l'humain mais pouvant entraîner la mort de bovins, la DNC est "sous contrôle" assure de son côté le ministère de l'Agriculture, qui a ouvert mardi "des réflexions" sur la vaccination préventive du cheptel français.
Contrairement à la CR et à la Confédération paysanne, la FNSEA y est plus réticente en raison du "risque d'effondrement des exportations et des prix" qu'elle pourrait entraîner, a expliqué mardi à l'AFP son président, Arnaud Rousseau.
Les cas détectés de DNC dans l'Ariège et les Hautes-Pyrénées sont les premiers recensés dans ces départements depuis la détection du premier foyer en Savoie le 29 juin 2025.
En Occitanie, une centaine de manifestants avaient tenté de s'opposer début novembre à l'abattage de 80 bovins dans un élevage touché par la DNC à Thuès-Entre-Valls, dans les Pyrénées-Orientales. Ils avaient été délogés par les gendarmes avant que les services vétérinaires ne procèdent aux euthanasies.
(P.Werner--BBZ)